Improviser pour un JDR fait partie des talents autour duquel tout un mythe se construit dans la communauté. Il est pourtant à la portée de tous les bons meneurs.
Le jeu de rôle se démarque de quasiment toutes les autres activités ludiques par son interactivité. En effet, il n’y a pratiquement pas de limites, sinon le plaisir et l’imagination des participants.
Le problème du « scénario »
Par conséquent, les scénarios, y compris les modules les mieux tracés du commerce sont soumis à un facteur incontrôlable, les joueurs. Principaux acteurs de l’histoire à travers leurs PJ, ils peuvent « dérailler » rapidement un récit. Ce qui est pourtant tout à fait normal !
Erreur de débutant, mauvaise influence attribuée aux célébrités du monde de l’Actual Play, détérioration des capacités des meneurs de jeu modernes, conséquence d’une mentalité formatée par les jeux vidéo… À tort ou à raison, les explications fusent. Le sujet fait souvent débat sur les forums spécialisés.
Mais, une conclusion commune s’impose toutefois au cœur de ces discussions. L’aptitude à savoir improviser est essentielle pour mener un JDR.
Improviser pour raconter une histoire dans un JDR
Pour reprendre une formule qui revient souvent pour conseiller les débutants : le meneur de jeu n’est pas un conteur. C’est-à-dire qu’il n’est pas là pour raconter son histoire à ses joueurs. Il ne lui appartient pas de tracer des rails précis qui aboutissent à un dénouement tel qu’il l’imagine, trajet et destination doivent résulter des décisions des joueurs.
Puisque le jeu de rôle se compose d’un dialogue entre le meneur et les joueurs, en ce sens, il doit y avoir des échanges entre ces deux parties. Ceux-ci expliquent que la narration du « scénario » doit en fait être partagée. Pour y arriver, le MJ doit pouvoir improviser tout au long d’un JDR.
Cette perspective peut sembler terrifiante pour les meneurs qui commencent dans le monde du jeu de rôle. C’est ainsi qu’ils se mettent à préparer excessivement le déroulement du jeu et à inventer des garde-fous afin de canaliser les PJ. Cet ensemble vise, en théorie, à les empêcher de prendre le maître de jeu de court.
En revanche, cette approche peut nuire à l’expérience. Elle retire la capacité des joueurs à réellement être actifs, la substituant par un semblant de choix. Elle les oblige en fait à réagir d’une manière précise. C’est pour y remédier qu’il faut pouvoir improviser quand on mène un JDR.
Inventer, mais avec méthodes
Les outils pour improviser dans un JDR
Pour cela, le meneur doit se préparer suffisamment, mais pas trop. Une manière d’y parvenir est de tirer s’inspirer de la mise en place d’une campagne du style monde ouvert. Le point de départ du MJ se constitue alors d’un noyau dur autour duquel la partie se construira. Un monde précis, un espace clair, des personnages non joueurs complets et des pistes sont l’essentiel des notes.
Pour la suite du JDR, il faut improviser. Mais en s’essayant à cet exercice, on se rend compte de sa difficulté. En particulier, comment trouver spontanément et efficacement des éléments pour répondre aux questions des joueurs ou en conséquence de leurs réussites et échecs ?
Certains systèmes de jeu proposent des outils qui peuvent aisément être empruntés pour toutes les parties de jeux de rôle. Les tables aléatoires, les oracles ou encore les cartes tels qu’on en trouve dans les gammes de Mörk Borg, Horrifique ou Ironsworn permettent d’inventer en plein vol. Par exemple, besoin d’un PNJ ? Quelques jets de dés lui donnent un nom, une description, un tempérament et même un objectif !
Un autre outil à destination des meneurs qui doivent improviser pour leurs JDR, ce sont les fronts dans Dungeon World. Cette fiche permet de créer et de suivre les actions des forces antagonistes aux PJ tout au long du scénario. Il est d’ailleurs recommandé de le laisser majoritairement vide pour ne compléter et corriger les informations qu’au fur et à mesure de l’évolution du monde en réponse à l’action ou non des personnages des joueurs.
La pratique : l’art de mener un jeu
Les outils ne peuvent pas faire tout le travail et au final, le meneur du jeu reste un artisan (voire l’artisan principal) du monde. Dans ce cas, seule la pratique fait la différence.
S’essayer aux jeux de rôle en solo constitue un bon exercice pour y parvenir. D’une part, pour un JDR en solitaire, le participant doit énormément improviser afin de garder la surprise. Le meneur apprend ainsi à accepter de ne pas avoir de réponse et à l’inventer sur l’instant. Et d’autre part, c’est un moyen de s’habituer à lâcher prise, à ne pas craindre de perdre la « maîtrise » du jeu, et même à la laisser aux autres joueurs… et aux dés.