Donjons & Dragons 2024 a fait couler beaucoup d’encre depuis son annonce. Avec la fin des NDA, les créateurs partagent leurs avis.
Après des mois, sinon des années d’attente, les fans de DnD peuvent enfin se réjouir : la nouvelle version du jeu arrive presque sur le marché. Ou pas exactement? En effet, plutôt que de lancer une 6e édition, il s’agit d’une grosse mise à jour pour les dix ans de la 5E. Malgré tout, tous les regards étaient tournés vers Wizards of the Coast.
Un contexte de présentation miné par les controverses
Or, depuis quelque temps déjà les équipes de marketing faisaient tourner la machine à hype. Interview des designers sur les promesses de l’ouvrage, partage d’illustrations sur les réseaux, envois d’exemplaires en avance aux influenceurs les plus connus de DnD.
Durant le mois de juin 2024, ces derniers ont montré chacun un aspect de cette nouvelle édition du jeu. Les classes, en particulier, ont été répartis entre eux, avec par exemple, le Barde pour Ginny Gi qui a révélé l’existence de la nouvelle sous-classe, Dance Bard. Petit à petit, on en découvrait sur ce qui allait n’être que la partie émergente de l’iceberg.
Avec le début du mois d’août, soit 1 mois et demi avant la sortie US du Player’s Handbook, ils peuvent s’ouvrir un peu plus et partager leurs retours et critiques. Les vidéos pleuvent avec des avis plus expressifs que durant les semaines précédentes. En conséquence, on peut parler de la première épreuve du feu de cette mise à jour à l’historique cahoteuse.
D’ailleurs, même ces partages ont eu leur part de troubles. Wizards of the Coast avait perdu une partie de la bonne foi du public après des actions discutables, conduisant les créateurs à décrier son attitude. Par souci de transparence, certains ont commencé à s’ouvrir sur leurs relations avec la compagnie quitte à reverser les bénéfices à des charités. Après seulement, ils parlent du Player’s Handbook de Donjons & Dragons 2024.
Donjons & Dragons, la modernisation de la classique 5e édition pour 2024
2014 – 2024, 10 ans d’affinage pour un meilleur Donjons & Dragons
Sans plus attendre, globalement, les créateurs arrivent à une même conclusion sur ce livret. Il constitue une réelle amélioration par rapport à son prédécesseur sorti en 2014. Crawford et toutes les équipes de WotC ont su capitaliser sur cette décennie des rôlistes et d’évolution du JDR.
Au rang des modifications plébiscitées par tous, on compte la clarification et la simplification de certaines règles. D’une part, ceci simplifie le travail des meneurs, mais aussi, d’autre part il fait de Donjons & Dragons 2024 une meilleure porte d’entrée pour les néophytes qui veulent se lancer à l’aventure.
Le layout du livret va d’ailleurs dans ce sens. En plus d’être plus beau, avec des illustrations hautes en couleur, il propose une nouvelle disposition des chapitres. Cette dernière favorise d’abord la compréhension de la nature et du déroulement d’un JDR avant de toucher les questions mécaniques. Il propose beaucoup d’exemples de situations illustrant la discussion entre un meneur et les joueurs. La création des PJ fait le cœur de ce Player’s Handbook.
Un jeu plus cohérent et modulable, mais…
Pour Donjons & Dragons 2024, WotC a modernisé les personnages. 12 classes sont là, il manque l’Artificier et chaque classe possède 4 sous-classes. Un meilleur ratio en comparaison du gros déséquilibre de 2014 où Mage et Clerc avaient la part du lion. Les options sont maintenant plus souples et plus équilibrées, tout du moins elles le devraient, mais les avis divergent et chaque table peut faire ou défaire ce travail par son style de jeu.
Ce qui amène aux potentiels problèmes que les premiers retours lancent à l’encontre de cet ouvrage. C’est le Player’s Handbook et sa sortie si longtemps avant le nouveau livret du meneur et le bestiaire remis à neuf semble causer une petite crainte quant au rééquilibrage des parties dans les mois à venir. On ne sait encore quasiment rien des deux ouvrages suivants. Cependant, ce possible désagrément reste le plus petit de la liste.
L’éternel démon de DnD : l’équilibrage des classes
Plus important, il y a la question de l’homogénéisation des classes, des backgrounds et des espèces (anciennement races). Afin de s’aligner sur une meilleure politique éthique, tout du moins selon l’équipe de WotC, Donjons & Dragons 2024 abandonne une partie de sa tradition, en particulier l’alignement par défaut pour les Drows et les Orcs. Certains dénoncent que l’on perd aussi ce qui faisait leurs identité, d’autant plus qu’il n’existe plus d’espèces hybrides (demi-orc, demi-elfe… parmi ceux jouables).
Mais surtout, malgré toutes ces remises à niveau, les classes demeurent inégales sur le plan de la puissance. En effet, toute la communauté s’accorde à dire que le bilan sur ce point reste mitigé. Si le Moine et toutes les classes martiales en général ou encore le Barde ont vu leurs options et capacités revues à la hausse, le Rôdeur reste sur sa faim et le Mage demeure quasiment identique à sa version de 2014.
Cependant ce choix de rester compatible constitue peut-être le vrai fardeau qui tire ce titre vers le bas. En se forçant à vouloir à la fois faire peau neuve sans oser se séparer de la 5E, cette édition mise à jour fait dans la demi-mesure. Elle ne peut finalement pas aller trop loin dans ses innovations. Ainsi elles restent minimes et souffrent de la comparaison avec les produits des autres éditeurs ou même des homebrew indépendants.
Trop de vieilles briques …
En effet, Donjons & Dragons 2024 ne peut que prétendre innover. Les autres peuvent carrément se permettre de repousser le potentiel du jeu. Ici, nous avons une demi-page de règles sur l’artisanat, dans Ryoko, il s’agit des mécaniques inédites complètes ; DnD 2024 a généralement repris ses vieilles règles, Nimble les a accélérés au maximum.
Et c’est sans compter sur une nouvelle espèce de rival. En effet, il existe à présent une collection de hacks de DnD5E. Il s’agit d’œuvres d’autres auteurs qui profitent du SRD pour faire de nouveaux jeux qui tournent sous ce système, mais qui se veulent uniques. Pour certains, on change surtout l’apparence comme le steampunk Victoriana.
Enfin, au niveau des innovations, le catalogue compte de nouveaux concurrents sérieux. En 2024, on trouve DCC, Daggerheart, DC20 ou encore Shadowdark qui proposent de nouvelles manières de jouer qui ne sont pas Donjons & Dragons. Et de nouveaux arrivants ne cessent d’apparaître.
… ou des valeurs sûres?
Comme l’atteste cette situation, la scène des jeux de rôle a changé en une dizaine d’année. En effet, il n’est ni aussi limité, ni aussi inconnu et WotC doit adapter son cheval de bataille en tenant compte de cette évolution. DnD jouit toujours de ses avantages. Ses moyens marketings, sa visibilité auprès du grand public, son accessibilité et son vaste catalogue d’extensions sont toujours présents.
Et de ce que l’on a vu avec le manuel du joueur et des previews du guide du meneur, il semble qu’ils sont sur la bonne voie. Ainsi, ce lifting ne s’intéresse que secondairement aux vétérans. La cible principale reste le nouveau public, celui qui vient de découvrir ou va découvrir le hobby avec ces ouvrages.
L’ergonomie améliorée du manuel des joueurs 2024 de Donjons & Dragons n’était qu’un avant-goût en comparaison du guide du meneur. Ce dernier ose sauter le pas. Et il accepte que certaines évidences pour un MJ expérimentés doivent être explicitées auprès des néophytes. Il consacre donc des chapitres entiers à exemplifier les outils du meneur.
Le fait est que le guide 2014 listait à peine les règles générales et quelques variantes. Mais sans aider face aux vrais défis qui attendent un maître de jeu, une fois dans la partie. 2024 corrige le tir! Rien que pour ces conseils, beaucoup estime que cette version mérite son prix.