Trail of Cthulhu est un petit membre de la grande famille des JDR Lovecraftien. Il met en avant le côté « enquête » du genre.
L’influence de H.P. Lovecraft sur la fiction n’est pas négligeable. En effet, en plus d’avoir créé un genre, l’horreur cosmique, il a aussi laissé un univers de fiction que les fans explorent à travers de nouveaux récits, y compris en jeux de rôle.
Trail of Cthulhu, un JDR né du travail d’un passionné
Si l’on ne présente plus le premier du genre, le JDR l’Appel de Cthulhu, il a plus tard donné naissance à d’autres titres dont Trail of Cthulhu (ToC). Ce dernier prend le pan « investigation » que l’on retrouve dans son précurseur et se concentre, d’un point de vue thématique et mécanique, à le mettre le plus en avant.
Kenneth Hite a créé ToC au milieu des années 2000. Le livre de base est ainsi paru d’abord en Anglais chez Pilgrane Press avant d’avoir une version française du côté de Le 7ème Cercle.
L’avantage des années 30 comme cadre de campagne
Hite est un grand connaisseur du Maître, de son œuvre ainsi que du Mythe. Et ceci se remarque dans les pages de Trail of Cthulhu, que ce soit du côté de l’esthétique que du côté des mécaniques de son JDR. Un choix qu’il fait, par exemple, est de choisir le cadre des années 30 pour celui par défaut de ToC, à la différence des années 20 de l’AdC et des nouvelles.
L’ambiance générale se différencie ainsi grandement de ces derniers : fini le faste des Années folles, place à la Grande Dépression et les problèmes sociétaux qu’elle implique, le Monde est aux portes d’un nouveau conflit d’envergure planétaire… Un cadre de désespoir propice aux troubles. D’autant plus qu’à ce stade de nombreux événements canon du mythe ont eu lieu.
De ce fait un Gardien peut, mais n’est pas obligé, de piocher dans ceux-ci pour trouver de l’inspiration. Herbert West a disparu après ses expériences sur la résurrection en 1921, L’Appel de Cthulhu place le réveil temporaire du Grand Ancien en 1925, les Mi-Go occupent les forêts du Vermont en 1928, l’université Miskatonik lance son expédition en Antarctique en 1930… En se plaçant dans cette décennie, Trail of Cthulhu dispose d’un terrain de jeu tout fait.
Par ailleurs, l’ouvrage ne s’en prive pas puisqu’on retrouve une partie de ces protagonistes dans les pages de ToC en tant que PNJ récurrents. En particulier, les Docteurs Armitage, Dyer ou Peaslee pourront aider (ou gêner) les Investigateurs durant leurs missions face aux Grands Anciens, leurs serviteurs et les autres créatures.
L’Investigateur et…
Un Investigateur de Trail of Cthulhu se conçoit suivant un système de points que le joueur va pouvoir distribuer en fonction de son PJ. D’abord, il faut déterminer sa profession. En effet, les coûts des Compétences dépendront de cette dernière, celle-ci détermine aussi son niveau de vie ainsi qu’une règle spéciale.
Les Compétences occupent une place centrale dans le système de jeu de ToC, aussi le nombre total de points dépend aussi du nombre de PJ réguliers. Ils partent du principe qu’un personnage est compétent dans son champ d’activité et qu’il est là pour résoudre une enquête à travers les indices qu’il récolte sur les différentes scènes de crime. Ce sont les bases du système GUMSHOE.
… le système GUMSHOE de Trail of Cthulhu : un JDR d’enquête…
Ici, pas de jets pour trouver des pistes, au risque qu’un jet malheureux ou une mauvaise décision par les joueurs fasse stagner l’enquête. À la place, dans le JDR Trail of Cthlhu, ils trouvent automatiquement les indices du moment qu’ils possèdent et emploient la bonne compétence. Cependant, ceci vient avec pour nuance qu’ils doivent gérer comment ils dépensent les points assignés à celles-ci pour approfondir leurs découvertes.
À partir de ces dernières, les Investigateurs pourront découvrir des pistes pour aller à la prochaine scène. Ainsi, d’indice en indice, ils traceront la piste jusqu’au fin mot de l’enquête. Celui-ci reste semé d’embuches qui testeront les aptitudes des PJ lors de jets.
Les jets ne se font plus que sur un seul d6, dans le cas où une action nécessite une compétence en dehors de celles liées à l’investigation. Le pilotage ou l’athlétisme, par exemple. La dépense des points débouche cette fois sur un bonus équivalent lors du test, l’objectif étant de dépasser le seuil de difficulté imposé par le Gardien. Seuls les joueurs font des jets dans ToC.
… Mais simple et dans l’esprit de Lovecraft !
En héritage au JDR l’Appel de Cthulhu et à Lovecraft plus généralement, Trail of Cthulhu inclut des règles quant à la santé et l’équilibre mentaux des Investigateurs. ToC fait une différence entre les deux, dans le sens où l’équilibre se perd et se régénère plus libéralement que la santé. Cette dernière peut avoir des conséquences plus dramatiques quand un Investigateur pioche dans cette réserve. La régénérer est aussi un processus plus engagé et long.
Cette distinction n’est pas aléatoire. Et pour cause, elle permet, selon Hites, de retranscrire une certaine nuance présente dans les récits de Lovecraft au niveau des personnages. Ainsi, cette différence permet de séparer ceux qui, comme Thurston, perdent la raison après un bref contact avec le Mythe de ceux qui, à l’instar d’Armitage, ont fait face à plusieurs reprises à l’Horreur sans se laisser totalement briser.
Malgré cette petite complication dans son système de jeu, Trail of Cthulhu va directement à l’essentiel et reste ainsi un titre facile d’accès. Plus fluide que l’AdC, mais avec plus de mécaniques qu’Horrifique ainsi que la possibilité d’intégrer ou non un certain degré de pulp, il se constitue comme niche le juste milieu. Ainsi, il devient un titre de choix pour certains fans d’horreur afin de raconter leurs histoires de terreur cosmique.
La sélection de scénarios et d’extensions disponibles dans la gamme promet des semaines, sinon des mois de campagnes. De plus, en raison de son fonctionnement, un Gardien qui s’est familiarisé avec Trail of Cthulhu peut tout aussi bien adapter des scénarios venus d’autres JDR Lovecraftien, en particulier de l’Appel de Cthulhu pour le système GUMSHOE.