Utiliser des musiques dans les parties de JDR semble relever de l’évidence. Cependant, la théorie diffère de la pratique.
La musique et l’homme sont des compagnons quasi inséparables. En effet, ces productions sonores ponctuent la vie des humains, que ce soit au travers des derniers tubes qui passent en boucle à la radio ou des compositions spécifiques à certains moments de la vie, on retrouve la musique partout.
L’attrait de la musique pour les rôlistes
Il ne faut donc pas s’étonner que les rôlistes pensent souvent à intégrer des musiques lors des parties de JDR. Par ailleurs, avec l’inspiration des films, des animes, des jeux vidéo et surtout des actual play, beaucoup veulent s’essayer à l’exercice… Avant de se heurter à différents obstacles pendant, voire en amont du jeu.
En conséquence, avant de se mettre à table, il faut partir sur de bonnes bases. À commencer par comprendre l’importance, l’utilité et les risques de cette pratique pour le bon déroulement du jeu en lui-même.
Les musiques : un outil pour enrichir les parties de JDR
La musique pour l’immersion dans le JDR
La fonction primaire d’avoir des musiques dans le JDR, c’est de mettre de l’ambiance durant les parties. En règle générale, la musique ne se trouve pas au centre du jeu, mais contribue à l’améliorer. Ainsi, à l’instar des séries, des films et compagnies, avoir une chanson en fond contribue à enrichir l’atmosphère.
Que ce soit l’espace ou le temps, la musique peut l’évoquer. Hormis l’exemple évident de donner l’atmosphère d’un lieu, comme une musique au luth pour une taverne médiévale, on peut utiliser la musique pour les évènements. C’est ainsi que les scènes de bataille gagnent en grandeur avec de la musique appropriée.
Il se peut cependant que la musique prenne un rôle plus actif dans le jeu. En effet, en l’intégrant dans la diégèse, donc dans l’univers de la fiction, elle contribue à immerger les joueurs dans celle-ci. Pour reprendre l’illustration du luth, dans ce cas, il y a un barde qui en joue dans ladite taverne.
La musique comme outil de narration
Par extension, le meneur de jeu peut aussi lui trouver une application pratique. À titre d’exemple : la musique d’un piano peut servir comme un indice dans une investigation ou comme timer pour un jeu d’horreur.
Enfin, les musiques donnent du rythme à la narration durant les parties de JDR. Pour comprendre cette notion, il faut se tourner vers la liste des musiques qui accompagnent une œuvre. Disons un JRPG tout ce qu’il y a de plus traditionnel où les combats se lancent aléatoirement lors de l’exploration de la carte. En parallèle, leur thème musical vient interrompre la musique de fond, de même pour les combats de boss qui se démarquent ainsi des combats aléatoires.
Pour ces trois raisons, les rôlistes peuvent être tentés d’utiliser de la musique. Or, quand on regarde sur les forums, on constate qu’il y a des points négatifs. Ainsi, une part des utilisateurs s’oppose à l’idée et n’y trouvent que des points négatifs
Le revers de la chanson : des limites et des obstacles
En fait, sans attention de la part du meneur, la musique ne peut pas remplir ces fonctions. Pire, elle peut se retourner contre la table et empoisonner la partie.
Ainsi, un mauvais choix de musique peut briser l’atmosphère. Deux situations peuvent se produire. D’abord, un premier cas, c’est parce qu’il ne respecte pas l’espace ou le temps de l’action : une musique de foire pendant une scène dramatique, par exemple. En conséquence, le son ne va pas évoquer la bonne émotion chez les joueurs.
Ensuite, une autre situation, c’est quand les musiques viennent perturber le rythme des parties de JDR. Voici quelques-uns de ces moments.
Premièrement, les manipulations nécessaires pour gérer la musique qui suspendent le jeu pendant quelques secondes. Peu importe si un thème est approprié pour une situation donnée, arrêter la narration dans son élan pour la lancer peut au contraire gâcher la scène au lieu d’avoir l’effet voulu.
Deuxièmement, la familiarité avec une chanson peut avoir des effets inattendus. Certaines musiques sont si iconiques qu’elles amènent immédiatement des images précises chez les auditeurs. En conséquence, ceci va le sortir de l’immersion dans le JDR auquel il était en train de jouer pour l’emporter dans une autre œuvre.
Troisièmement, un mauvais équilibre en qualité ou en quantité peut nuire au jeu. Les joueurs sont avant tout là pour les parties de JDR. Donc, une musique trop forte va noyer les voix des participants, ce qui est contre productif dans le cadre d’une activité de groupe. Inversement, une musique trop discrète n’aura pas de bénéfice et pourrait tout aussi bien être supprimée.
Comment préparer des musiques pour des parties de JDR ?
Comme pour tout ce qui touche aux jeux de rôle, rien n’est absolu et il faut se référer à chaque table pour trouver l’idéal. Cependant, on peut partir sur quelques pistes à partir de ces besoins et de ces risques.
Les critères des bonnes musiques pour des parties de JDR
D’abord, pour les JDR, le choix des musiques pour les parties doit être conscient de la part du meneur. Ainsi, au cours de son travail de préparation avant chaque session, notamment la première, il appartient au MJ de choisir, trier, et surtout organiser les pistes qu’il pourrait diffuser au cours de la partie. Toutes les œuvres musicales ne se valent pas pour l’usage dans le cadre des jeux de rôle.
Un compagnon discret…
En premier lieu, il vaut mieux n’utiliser que des pistes sans paroles puisqu’elles gênent l’attention. Cette règle n’en est pas réellement une, comme toutes les autres. En effet, on peut y faire une exception dans le cas où un personnage présent qui la chante et qu’on souhaite communiquer quelque chose aux joueurs par ce moyen. J’explore certains de ces aspects avec l’actual play « Sweet On Jenny ».
Hormis l’absence de parole, la piste ne doit aussi véhiculer qu’une seule ambiance ou émotion. Cela se remarque surtout avec la musique de film où une chanson peut avoir un début triste, mais remonter en rythme avec le changement d’ambiance de la scène. On ne peut pas avoir un tel contrôle dans le cadre d’un jeu de rôle.
Privilégier les pistes courtes
Ceci amène au second lieu. Les pistes n’ont pas à être excessivement longues. En effet, puisque les joueurs tendent inconsciemment à la bloquer, la musique n’a réellement d’effets que dans les premières minutes où elle est lancée.
Fondamentalement, cela fait des longues pistes de musiques génériques de réels pièges à rôlistes. À la place, il vaut mieux monter le volume au moment de lancer la musique et le baisser graduellement quand on commence à narrer. La piste s’arrêtera d’elle-même sans perturber l’attention des joueurs.
Le silence et la musique dans les JDR
Petite parenthèse, dans les JDR le silence devient un outil tout aussi important que les musiques au cours des parties. En brisant le silence, elles signalent aux joueurs que quelque chose a changé et en fonction de la musique, ils peuvent déduire ce qui arrive. Marquer l’entrée d’un nouvel ennemi plus puissant avant un combat par exemple ou encore noter que l’endroit est sécurisé.
En troisième lieu, le volume sonore doit être plus ou moins constant entre les pistes. Autrement, elles obligent le meneur à perdre du temps en manipulations à chaque changement de piste sonore. Ce point en particulier explique que le meneur doit se familiariser avec la méthode qu’il emploie pour gérer le son.
Le meneur de jeu, un DJ improvisé
De même, au lieu de chercher la musique sur YouTube ou dans un gros dossier au cours de la partie, il faut les organiser en amont. Pour cela, il faut les télécharger, les renommer, les numéroter et les organiser. Le faire en fonction de l’ambiance que chacune doit évoquer est une bonne initiative.
Il faut aussi sacrifier quelques heures pour acquérir quelques automatismes pour manipuler le matériel. Que ce soit un simple smartphone ou un clavier avec des raccourcis dédiés, la rapidité est clé. Ainsi, le meneur perd le minimum de temps pour les lancer, voir, peut les activer en parallèle à son récit ou à celui des joueurs sans interrompre l’élan de la narration.
Préparer des pistes supplémentaires et se familiariser avec importent aussi afin de pouvoir improviser. En effet, les joueurs peuvent être imprévisibles et s’ils parviennent à modifier complètement l’ambiance par rapport à celle que le meneur prévoyait, il faut se tenir prêt à l’éventualité.
Les gisements de musiques pour les parties de JDR
Pour finir donc, où trouver des musiques à utiliser pour les parties de JDR ? Comme on l’a déjà évoqué plus haut, YouTube en regorge (RoleplayRhythms), mais il vaut mieux éviter les compilations de musiques génériques qui durent plusieurs heures. À la place, il faut privilégier le téléchargement séparé des pistes pour les utiliser individuellement.
Le même conseil s’étend aux pistes tirées des bandes sonores de films, séries, etc. À cela, on peut ajouter qu’il vaut mieux emprunter à des œuvres moins connues et qui en valent pourtant le détour. Les musiques d’époque (comme ce que font G&T pour la campagne La Rose & Le Lys) fonctionnent aussi très bien, ce que nous explorons aussi dans cet actual play.
En parlant de musique de franchise : une tendance dans le monde des TTRPGs, c’est d’inclure une bande-son exclusive aux jeux. Ils donnent une bonne leçon quand il s’agit de comment choisir les musiques pour les parties de JDR. La série des jeux Mörk Borg donnent une place centrale à la musique, depuis le premier, puis ensuite Pirate Borg, Blood Borg, Red Borg… Tous possèdent leurs propres pistes sonores en accord avec leurs esthétiques punk respectives.
Il existe aussi des sites dédiés avec de la musique gratuite et libre. Du côté des tables virtuelles, certaines comme Roll20 ont leurs propres archives de musiques ou permettent de mettre en ligne celles que l’on veut.
Personne n’a de formule magique ou toute prête donc pour utiliser les musiques durant les parties de JDR. La préparation, la pratique et surtout l’attention sont de rigueur. Aussi, si vous vous lancez dans l’aventure, demandez l’avis du reste de la table pour leur avis sur l’expérience. Car, finalement, peut-être que les joueurs préféreront votre narration sans la musique.